ON NE PAIERA PAS LEUR DETTE !

dimanche 18 décembre 2011
par  Sud éducation 66

Par Nicolas Lambert

La dette publique, entend-on marteler sans cesse, est la raison de la politique d’austérité. Pour la résorber, il faudrait moins de dépenses publiques.

QUELLES SONT LES CAUSES DE LA DETTE PUBLIQUE ?

Les causes récentes :
Chaque année, le gouvernement se prive volontairement de :
- 66 milliards (niches fiscales)
- 15 milliards (impôt sur le revenu)
- 2 milliards (depuis la dernière réforme impôt sur la fortune)
- 30 milliards (exonération patronale de charges sociales)

Une cause profonde, plus grave :
Depuis 1973, l’État n’a plus le droit d’emprunter auprès de sa banque nationale (à 0%) mais doit le faire auprès des marchés financiers et des grandes compagnies financières qui s’engraissent comme jamais. Cela se traduit par la privatisation de la fonction monétaire qui est attribuée aux banques. C’est à partir de ce moment que la dette publique augmente alors qu’elle était nulle !
En réalité, le montant de la dette est à peu près équivalent à la somme payée aux banques privée en intérêts, comme l’explique très bien le documentaire (en français sur Youtube) Government debt explained (in a few minutes) :
www.youtube.com/watch?v=P8fDLyXXUxM

POURQUOI REFUSER DE PAYER LA DETTE ?

Un documentaire intitulé Debtocracy – Chréokratia (Chréos est le mot grec pour "dette") fait fureur en Grèce. Il s’appuie notamment sur :

∙ Le concept de la « dette odieuse »
Alexandre Sack élabore en 1927 la notion de « dette odieuse » qui a trois caractéristiques :
1) La dette a été contractée par les dirigeants sans l’agrément ni l’approbation des citoyens.
2) Les fonds empruntés sont investis dans des biens qui n’ont pas profité aux citoyens ou au pays.
3) Le prêteur est parfaitement informé de ces faits mais sifflote en toute indifférence…

∙ L’exemple de l’Equateur
L’Equateur pourrait être un des pays les plus riches de l’Amérique Latine. Mais à partir du moment où il découvre du pétrole, le pays ne connaît que les dictatures, la pauvreté, la dette et les tueurs économiques.
Quelques temps après, l’Equateur se révolte. La crise semble sous contrôle quand Lucio Gutierres prend les choses en main et promet des réformes. Il se présente presque comme socialiste. Mais une fois aux affaires, il passe de nouveaux engagements auprès du FMI et impose une extrême rigueur.
Les citoyens décident qu’il doit partir et ce, par le même moyen que les présidents argentins, par hélicoptère. Le peuple se tourne alors vers le seul responsable politique à s’être opposé aux USA : Raphael Correa. « Ce n’est pas normal que le supplément de revenu pétrolier qui arrive dans les caisses du pays reparte intégralement au remboursement de la dette. C’est injuste pour la population. 80% des revenus pétroliers doivent être destinés à améliorer les dépenses sociales dans l’éducation, la santé, la création d’emplois. Seuls 20% doivent aller dans le remboursement de la dette." dit-il en 2005.
Correa finit par devenir président de l’Equateur en 2006. L’une de ses premières décisions est de limoger le représentant de la Banque Centrale, d’en chasser les représentants du FMI. Six mois plus tard, Correa fait un pas de plus en établissant une commission de contrôle internationale.
En dépit des difficultés, la commission mène à bien sa mission et constate qu’une grande part des dettes est surévaluée. L’État communique ces résultats aux citoyens.
Possédant les résultats de la commission, le gouvernement démontre que la dette est infondée et bloque 70% de son remboursement.

∙ Le cas de la Grèce
« La Goldman Sacks a conseillé le gouvernement grec d’une main et de l’autre main attaquait le gouvernement grec. » dit Jean Quatremer, journaliste à Libération
Le scandale est découvert en 2010. Quelques jours avant, un ancien employé de Goldman Sacks avait été nommé à la tête de l’organisme de gestion de la dette nationale grecque.
« Embaucher quelqu’un qui a été chez Goldman Sacks, c’est comme embaucher un criminel pour surveiller votre maison… Effectivement il connaît bien les opérateurs et sait comment empêcher quelqu’un d’entrer dans votre maison, mais objectivement, le risque est bien plus grand qu’un jour il profite de votre absence pour tout piquer. _ Qu’est-ce qui me garantit que ce personnage qui est passé chez Goldman Sacks va gérer de façon optimale les affaires grecques ? » explique Jean Quatremer.
L’exemple de l’Equateur nous a montré que les circonstances illégales dans lesquelles la dette a été générée peuvent être dévoilées par une commission d’enquête d’économistes.
Plusieurs spécialistes politiques et économiques se prononcent contre le remboursement de la dette :
« Même si il était démontré que l’intégralité des 350 milliards d’Euros de la dette souveraine grecque étaient légitimes, la Grèce ne pourrait de toute façon pas l’honorer. Il faudra donc l’effacer. Si le poids de la dette impose le démantèlement des hôpitaux, de l’éducation, des routes, dans ce cas c’est le coût social qui deviendra insupportable. Je ne comprends pas comment un gouvernement socialiste, élu démocratiquement, peut décider de faire défaut à ses citoyens plutôt qu’aux institutions financières. Il n’y a pas d’autre choix, dans les décennies qui viennent, que de ne pas honorer la dette car elle est basée sur le néolibéralisme. Et le comportement néolibéral était un crime contre l’humanité. Personne n’a l’obligation de payer cette dette, parce que cette dette a été accumulée à travers un fonctionnement vicieux du marché. » explique Constantin Lapavitsas.

« N’ayez surtout pas peur, en tant que Grecs, de revendiquer vos droits dans l’UE, par rapport au gouvernement grec. C’est fondamental, c’est en se battant qu’on fait respecter ses droits. Ce n’est pas en se soumettant au diktat des créanciers. Regardez la Tunisie, regardez l’Egypte. C’est quand une population se met en action qu’elle peut réellement changer une situation », dit Eric Toussaint.

… ET EN FRANCE ?

Un site, www.audit-citoyen.org, appelle à soutenir, en signant une pétition le collectif national pour un audit citoyen de la dette publique, ce site appelle également à la création de collectifs locaux.

Si l’on examine les causes de cette dette, l’on comprend qu’elle n’est en fin de compte qu’une excuse pour mieux démanteler les services publics, dont l’éducation.

(Sources : Solidaires, Debtocracy)