La force et la défaite

jeudi 1er janvier 2004
par  Sud éducation 66

Que s’est-il passé au printemps 2003 ? Comment le gouvernement a-t-il pu faire voter sa loi de régression sociale sur les retraites, maintenir son projet de décentralisation, c’est-à-dire de démantèlement pour les 90 000 T.O.S. et les 40 000 agents des D.D.E. ? Sans compter toutes les mesures qui jour après jour permettent aux plus aisés d’améliorer leur sort, aux plus pauvres, aux plus fragiles de s’appauvrir et de s’angoisser face à la précarisation de l’existence qui est l’idéal du néolibéralisme depuis les années 1930. Reprenons la chronologie des événements.

18 mars : Journée nationale d’action. La F.S.U. provoque une Assemblée Générale à la mairie de Perpignan. Sa direction, sous le prétexte de la présence de personnels non syndiqués à la F.S.U., refuse le vote de la reconduction de la grève. En outre, au cours des débats, elle fait de la question des retraites la question essentielle au détriment du problème de la décentralisation malgré une salle prête à l’action et préoccupée par le projet gouvernemental de démantèlement des services publics.

Finalement, la décision est prise - sans l’aval de la F.S.U. - de fonder une coordination départementale interprofessionnelle ouverte à tous (syndiqués et non syndiqués) pour préparer l’action à partir du 3 avril. Un responsable du S.N.E.S. y participera régulièrement.

3 avril : Début de la grève reconductible à partir de votes d’Assemblées Générales d’établissements ou de secteurs. Un comité de grève se constituera dans la foulée.

Jusqu’aux vacances de Pâques, alors que certaines organisations syndicales comme l’U.N.S.A. ou le S.G.E.N.-C.F.D.T. sont carrément absentes, l’attitude de la F.S.U. est pour le moins ambiguë. D’une part, ses responsables sont présents, certains de ses adhérents actifs et sincères. D’autre part, ces responsables ne font rien pour faciliter le travail du comité de grève, au contraire. Sa légitimité est contestée. Le SNUipp/
F.S.U. tentera de faire reprendre le travail dans le premier degré (AG du 11 avril). Si la grève s’étend, elle a du mal à se généraliser.

Pendant les vacances de Pâques : le comité de grève continue à se réunir.

1er mai : La F.S.U. s’accorde avec la C.G.T., F.O., l’U.N.S.A. pour refuser physiquement aux personnels de l’éducation (T.O.S., surveillants, enseignants etc.) syndiqués ou non, pour certains dans les organisations syndicales susnommées, de prendre la tête de la manifestation derrière la bannière du comité de grève des Pyrénées Orientales. Le gouvernement n’a guère besoin de répression !

A partir de la rentrée, le 6 mai, l’intersyndicale luttera avec un certain succès contre le comité de grève en laissant la voie/voix libre à Raffarin, Fillon, Ferry et autres Sarkozy. Dans le même temps, le S.N.E.S. et le SNUipp appelaient à la reconduction de la grève. Les adhérents de ces syndicats participaient massivement aux actions.

13 mai : De façon très physique , les organisations (F.S.U. et C.G.T. notamment) de l’intersyndicale empêchent un représentant du comité de grève de prendre la parole à l’issue d’une énorme manifestation d’au moins vingt mille personnes à Perpignan. Il aurait certainement, contrairement à leurs appels, prôné la grève générale.

14 mai : Les cheminots sont en grève reconductible avec les postiers. On pense que la grève générale est en bonne voie.

15 mai : l’espoir s’éteint, ceux qui avaient reconduit le 14 ont repris le travail.

25 mai : Ceux qui peuvent montent ce joindre à la plus grande manifestation jamais vu à Paris selon les propos des agents des renseignements généraux interrogés sur le parcours. Si leur chiffre officiel minimise le nombre de participants, 300 000, il est quand même supérieur au chiffre de 1994, 260 000. Si en 1994, les syndicats comptaient 1 million de manifestants, ils n’en trouvent plus que 600 000. Le mot d’ordre de grève générale est bien sûr oublié. Dans le même temps, des milliers de personnes manifestent à Perpignan.

10 juin : La ville de Perpignan est bloquée. Le comité de grève appelle à la même action le 12 juin, premier jour du baccalauréat.

12 juin : La F.S.U. a appelé à occuper l’inspection académique : on imagine l’angoisse du gouvernement. Certains de ses ténors appellent sur FR3 à faire passer le bac en faisant grève tout en surveillant, pendant que la position officielle était d’appeler les personnels à faire grève sans gêner le bac. De son côté, la C.G.T. faisait tout pour que les cheminots et les agents de la
D.D.E. ne participent pas au blocage de la ville. D’où l’échec de l’action.

19 juin : Dernière « grande » manifestation à Perpignan à l’appel des principales organisations syndicales. L’abandon des T.O.S. et des agents de la D.D.E. se dessine.

A partir du 12 juin, le découragement ou la colère gagnent ceux qui depuis 2 mois et demi manifestèrent, participèrent à des actions diverses (interpellations de députés, blocage de l’autoroute, etc.). De nombreux collègues reprennent le travail.

Comment un mouvement plus puissant que ceux de 2000 et de 1995 a-t-il pu à ce point ne pas réussir ?

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