La température de l’éducation prioritaire

vendredi 6 décembre 2013
par  Sud éducation 66

Par Héléna Molin et Mikaël Thévenot

Les enjeux sont énormes et le chantier ambitieux pour Super Peillon  : refonder l’éducation prioritaire. C’est vrai qu’on l’attend cette « refondation  » (quel vilain mot !) depuis les élections présidentielles. À croire que le parti de la majorité est arrivé aux manettes sans projet. Sauf si on considère que poursuivre le projet de destruction du service public d’éducation du gouvernement précédent est un projet. Si tel est le cas, bravo  ! Tout semble très bien parti  ! Mais revenons-en à ce fantastique dispositif mis en place par le Ministère de l’Éducation nationale  : les assises. Car c’est bien de cela qu’on parle.

Parallèlement à la mise en place (tardive, nous le rappelons) d’un début d’essai de réforme de l’éducation prioritaire, Vincent Peillon déclarait publiquement que finalement non, le système de primes n’était pas une si mauvaise idée, que la fonction de préfet des études dans les collèges semblait se justifier de plus en plus (mais qui t’a dit ça Vincent ? D’où sors-tu cette idée ? Sur quels rapports te bases-tu ?) et que les chefs d’établissement avaient réellement besoin de plus de maîtrise quant au recrutement de leurs équipes de « collaborateurs ». Si si, on parle comme ça maintenant  ! Vous n’aviez pas remarqué ? Une question se pose alors : avec des idées déjà si arrêtées sur l’éducation prioritaire, pourquoi organiser une telle « consultation » ?

Parce qu’on le sait très bien, c’est pas le genre de la maison d’imposer des décisions sans nous en parler avant, à nous, les seuls vrais acteurs de l’éducation, nous qui sommes sur le terrain, dans les classes, pas dans des bureaux.

Les assises donc. Au collège Marcel Pagnol de Perpignan étaient réunis le mardi 15 octobre de 14h à 17h, les enseignants des réseaux Pons et Pagnol. Une plénière a permis d’ouvrir l’après-midi. Quelques tables. D’un côté, la direction (chefs d’établissements, IENs et autres) avec les consignes et de l’autre, nous (professeurs des écoles, personnels RASED, AVS, AED, CUI, professeurs du second degré). Soit une dizaine de personnes d’un côté et à peu près deux cent à deux cent cinquante de l’autre. Les directives d’un côté, le personnel de l’autre.

Une fois de plus, il s’agissait de se conformer aux volontés de la hiérarchie. De se plier à leur gestion de l’espace et du temps, à leur gestion de la question « éducation prioritaire  ». Répartition des collègues dans vingt-cinq ateliers (certains avaient pu choisir le leur au préalable par internet mais d’autres absolument pas). Imposition d’un cadre semi-rigide (vous avez le choix de la question n°1 mais elle doit faire partie de la première thématique. Et vous ne répondrez qu’à deux questions.), on récupère et on fait une synthèse. Puis on fera une synthèse académique. Puis inter-académique. Puis nationale. Et après  ? Mascarade !

Pour toutes ces raisons, quelques collègues ont essayé de proposer une autre façon de s’asseoir. Pas pour changer les résultats de cette « consultation  » mais simplement pour se réapproprier un outil de travail : un temps institutionnel de réflexion. Nous devions être dans les murs et nous l’avons été. Mais nous l’avons été à notre façon, nous avons mené la réflexion que nous avions choisie de mener. Nous sommes acteurs de l’éducation prioritaire et nous voulions le rester jusqu’au bout. Nous fûmes donc une cinquantaine à nous réunir à partir de 16 heures autour de la question de nos conditions de travail.

Voici un aperçu des résultats de cette consultation parallèle (p 5). L’intégralité se trouve ICI. Nous avons dépouillé 151 questionnaires (86 questionnaires de PE, 36 de PLC, 6 questionnaires de personnels RASED, 11 questionnaires d’AED, AVS ou CUI et 12 questionnaires « autres »).

Nous vous proposons quelques pistes d’analyse que chacun·e est libre d’interpréter. Nous enverrons symboliquement tous les questionnaires papier au Ministère de l’Éducation nationale sans bien sûr qu’une seule trace d’un logo SUD éducation n’apparaisse.

Ce sont les professeurs des écoles qui ont fourni la majeur partie des réponses au questionnaire (57%), suivis par les enseignants du 2nd degré (24%).

Étant donné que la majorité des questionnaires ont été récupérés au collège Marcel Pagnol, les enseignants des secteurs Pagnol (54%) et Pons (40%) sont sur-représentés par rapport aux réseaux Sévigné et Jean Moulin.

69 % des personnels interrogés ont plus de 3 ans d’ancienneté en ZEP (52% ayant plus de 5 ans d’ancienneté) ce qui montre une bonne stabilité des équipes dans ces deux réseaux.

L’exemple d’un sujet qui fâche : la part modulable

La part modulable (ou part variable) est une prime au mérite introduite avec le dispositif ECLAIR.

Les trois questions posées concernent la légitimité de cette prime, son influence sur les équipes et l’avis des personnels sur sa pérennité.- 80% des personnels remettent en cause la légitimité de cette prime, soit parce qu’ils jugent qu’elle ne tient pas compte du travail réel des enseignants, soit parce qu’ils jugent qu’elle est arbitraire. À noter qu’à cette question, dans de nombreux questionnaires papier, les deux réponses ont été cochées.

- 62 % des personnels considèrent que la part modulable est un facteur de division dans l’équipe
- 63 % des personnels considèrent que cette part modulable doit être abolie et l’enveloppe destinée à financer des emplois et/ou des actions pédagogiques (voire des livres pour nos élèves, si si !!).

Ce système de prime est donc très largement rejeté par les personnels. Parmi ceux qui souhaitent que cette prime soit maintenue, une transparence quant à son attribution est demandée.

Exemple de réponses obtenues :

Te sens-tu sous pression ?

48% Un peu.
26% Beaucoup.
19% Pas du tout.
7% Sans réponse.

As tu déjà vécu le burnout ?
49% Jamais.
30% Une fois.
17% Plusieurs fois.
4% Sans réponse.

Une baisse des seuils d’élèves serait-elle un « levier d’efficacité » en ZEP ?

58% Très efficace.
32% Efficace.
6% Peu efficace.
3% Sans réponse.
1% Inefficace.