Rien de nouveau sous la refondation !

vendredi 14 décembre 2012
par  Sud éducation 66

C’est tambour battant que le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, annonçait rien moins qu’une refondation de l’école. En six mois, il a réussi à augmenter de quelques jours les vacances de Toussaint pour les faire rattraper à la fin de l’année.
Pour le reste, il ne manque pas d’ambitieux projets. Retour à la journée de quatre jours et demi avec l’idée dans un premier temps de faire travailler plus les enseignants du primaire pour un salaire qui baisse régulièrement. Car, non seulement nos salaires sont gelés, mais l’augmentation de la cotisation de la pension civile (PC) se traduit par une baisse visible du salaire. Quant aux enfants qui avaient une trop longue journée, elle sera aussi longue mais ils auront la chance d’être pris en charge en fin de journée par un personnel que les mairies devront fournir.
Or, la question que notre ministre ne semble pas se poser est celle de la compétence de ces personnels nouveaux qui devront notamment se charger de l’aide aux devoirs. Problème d’abord de droit. L’école est obligatoire et les professeurs des écoles sont recrutés avec un master II et après un concours. Quel sera le niveau de formation de ces personnels ? Qui sera chargé de vérifier la cohérence de leur intervention par rapport aux enseignants ? L’école est obligatoire, mais non la garderie. Dans quelle mesure les parents qui le peuvent n’auront-ils pas le droit de reprendre leurs enfants sitôt la journée normale d’école finie ?
Par contre, voilà un excellent cheval de Troie pour introduire de nouveaux intervenants à l’école autrement que par le biais des concours nationaux.
Ensuite, pour ce qui est de l’allègement de la journée d’école, il est nul. Elle restera toujours aussi longue. Quant aux devoirs à la maison, faut-il rappeler que l’interdiction des devoirs écrits datant d’une circulaire du 29 décembre … 1956, rien ne permet de préjuger qu’ils se feront à l’école. Gageons que les parents qui suivent les progrès de leur progéniture auront à cœur de vérifier que les nouveaux intervenants auront été pertinents.
Ainsi, la diminution de deux heures d’enseignement pour tous est purement et simplement entérinée. Notre nouveau ministre conçoit donc la refondation comme la continuation de la destruction néolibérale de l’école.
Enfin, le choix du mercredi matin est édifiant. Nombre d’activités périscolaires, sport, musique, etc. devront se concentrer sur le mercredi après-midi. Pourquoi ne pas revenir au samedi matin, sinon pour permettre à une infime minorité de parents de partir en week end.
Une école primaire au service de la minorité la plus aisée : premier axe de la refondation.
RASED. Durant sa campagne, l’actuel locataire de l’Élysée n’avait que ce mot à la bouche. Il signa même une pétition pour leur rétablissement. Depuis, le discours a changé. Sortir un enfant de la classe pour un travail spécifique de remédiation serait discriminant. Bref, rien de nouveau.
Au lycée, une modification d’ampleur s’annonce : la réintroduction de l’épreuve d’histoire-géographie en terminale S qui avait été cantonnée par Chatel en épreuve anticipée. C’est une promesse tenue. Mais comme elle se fait sans tenir compte du fond de la réforme Chater, elle l’entérine purement et simplement. Cette « réforme » est intéressante. Il ne fallait pas priver d’un enseignement fondamental – et c’est bien le cas – les élèves au moment où ils accèdent à la citoyenneté. Cependant, elle montre encore une fois que certains élèves sont plus égaux que d’autres. Que nombre d’entre eux n’aient pas de cours d’histoire-géographie en terminale comme les élèves du baccalauréat technologique STI ne posent aucun problème.
Conserver la hiérarchie des filières et, au nom de l’égalité, ne s’intéresser qu’à l’élite : deuxième axe de la refondation.
En 2003 le gouvernement de la toute jeune UMP échouait dans son projet de territorialisation des Conseillers d’Orientation Psychologues. Dans certaines Académies, en attendant leur rattachement à la région, certains d’entre eux se mettent individuellement en grève pour refuser d’assurer des permanences dans des mairies, sans matériel, sans suivi, sans projet, permanences qui leur sont demandées par des lettres de mission en bonne et due forme et qui les éloignent de leur Centre d’Information et d’Orientation où ils manquent au public.
Une destruction du caractère nationale de l’Éducation en la régionalisant et en la soumettant aux pouvoirs locaux : troisième axe de la refondation.
Rien ne le laissait présager durant la campagne. Ce n’est pas un reniement, c’est un indice très clair d’une volonté. Continuer à transférer aux pouvoirs locaux les compétences qui furent celles de l’État, condition pour en finir avec les métiers de droit public.
Rien de nouveau sous la refondation : elle est le nom de l’ordre néolibéral.
Patrice Bégnana.