Rythmes, digestion et promiscuité

vendredi 6 décembre 2013
par  Sud éducation 66

Par Mikaël Thévenot

Après les mobilisations de l’an passé et après le 14 novembre est venu le 5 décembre. Une journée de plus pour garder le rythme, une journée pour en remettre une couche. Et si on parlait d’autre chose ? Ou plutôt, et si on en parlait autrement ?

Puisque le seul moteur de la réforme des rythmes scolaires, et loin de moi l’idée d’en douter ne serait-ce qu’une seule seconde, est l’intérêt de l’enfant et le respect de son rythme chrono-biologique, revenons un instant sur la pertinence de la gestion communale des services de restauration scolaire.

Commençons par rappeler une chose  : une commune n’est pas légalement obligée de mettre en place un service de restauration scolaire. Dans les faits, on constate que la très grande majorité des communes le mettent en place. Dans certaines communes cependant, si le service de restauration est bel et bien proposé, il ne l’est pas pour tous.

Dans beaucoup de communes du département, les enfants dont les parents ne peuvent justifier d’un emploi ne sont pas accueillis à la cantine. Autrement dit, les communes ne souhaitent pas se donner les moyens d’accueillir tous les enfants qu’elles scolarisent au sein de leur service de restauration. Quel critère discriminant choisissent-elles  ? La disponibilité d’un parent. Quand les deux parents sont disponibles, c’est encore mieux  ! On pourrait également le dire ainsi  : quand un parent est au chômage, c’est bien, quand ce sont les deux, c’est encore mieux !

L’État voudrait donc nous faire croire qu’il se préoccupe de l’intérêt des enfants en réajustant les temps d’apprentissage alors que dans le même temps, il laisse certaines communes exclure d’un « temps périscolaire  » certains enfants dont les parents connaissent une période difficile (nous savons bien sûr que certains parents font le choix de récupérer leur enfant à midi, notre propos est bien de parler de ceux qui ne l’ont pas, le choix !). Et tout en prétendant œuvrer pour une école qui lutterait contre les inégalités sociales. Bien sûr, et nous l’avons rappelé, les communes ne sont pas dans l’illégalité quand elles sélectionnent les enfants accueillis à la cantine. Il n’est pour autant pas interdit d’agir autrement.

Ainsi certaines communes ont quant à elles misé sur une plus grande justice sociale et ont choisi de tout faire pour permettre à tous les enfants de bénéficier d’un repas équilibré le midi.

Certaines communes ont choisi de ne pas accabler des parents qui , connaissant déjà une période difficile d’un point de vue professionnel, n’ont pas besoin, en plus, de voir leurs enfants payer la note en étant exclus de la cantine.

Certaines communes ont choisi de ne pas « dire » à des enfants : « Oui, nous organisons un service de restauration mais toi tu vas rentrer à la maison car tes parents ne travaillent pas  ! Ils ne font rien de la journée, ils peuvent bien venir te récupérer et te préparer à manger. La société les assiste déjà assez comme ça ! Quoi  ? Tu aimerais bien rester avec tes petits camarades le midi car tu as l’impression de rater plein de choses ? Tu as envie de jouer avec tes copains et copines  ? Allez file avant que je t’interdise de mettre les pieds à la garderie ! Mais n’oublie pas pour autant de bien travailler en classe. C’est important ! ».

Tout cela remet en perspectives l’attribution aux communes de nouvelles responsabilités éducatives. Pour se convaincre du fait que l’État est le seul à pouvoir garantir la même qualité d’éducation et d’encadrement à tous les enfants scolarisés sur le territoire, on pourrait s’amuser à comparer les bibliothèques-médiathèques de nos communes. Ou bien le budget alloué aux éclairages de Noël.

Nous militons pour une école de qualité, un service public d’Éducation nationale non tributaire de la couleur politique des municipalités ni de leurs choix budgétaires. Dans péri-scolaire, il y a scolaire.

Et la promiscuité me direz-vous ? Le mot est dans le titre de l’article après tout. Puisque le seul et unique moteur de la réforme des rythmes scolaires est l’intérêt de l’enfant, la qualité de ses temps d’apprentissage et le respect de son rythme chronobiologique (je sais, je me répète mais c’est pour essayer d’y croire. C’est dur !), juste une info en passant : il paraît que c’est moins fatigant d’évoluer dans une classe de 20 élèves que dans une classe de 30.